Parlons d’un certain Rick Moody, l’auteur à la casquette de base ball retournée et de son livre « Purple America ». Rick Moody est un de ces auteurs américains dont chaque livre est un bijou avec sa prose bouffonne d’éternel adolescent. Dans ses écrits, l’auteur ne tourne pas autour du pot.  Il décrit la violence d’une société américaine « normalisatrice » mettant selon lui « la vie sous blister ». Rick Moody est aussi le roi de la « Punchline » littéraire. Si les thèmes ne sont pas toujours d’une folle gaité, l’humour est omniprésent. Plus c’est désespérant d’ailleurs et plus Rick Moody en fait des caisses, sauve la situation par bravade dans une sorte d’humour de bord du gouffre, d’humour d’extrême limite. 

Aujourd’hui nous parlons d’un petit livre au charme puissant « Au bord de la vaste mer » de Johan August Strindberg. Strindberg qui fait partie des auteurs suédois les plus importants, considéré comme un des pères du théâtre moderne ou encore de l’expressionisme. C’est un auteur qui a été souvent mal compris, donnant le sentiment d’être seul contre tous. Son thème fétiche est celui de l’homme solitaire à la compréhension supérieure qui vit au milieu des lourdauds et des imbéciles. C’est la trame de ce livre avec le personnage d'Axel Borg qui endure les persécutions et les intrigues triviales jusqu’à se réfugier dans une petite île loin de tout. Là encore, il se met à dos la population locale, jusqu’à ce que l’amour qui lui tombe dessus avec le personnage de Maria et le transforme radicalement.      

« Emprise » de Louis Bromfield est sans doute une pépite de la littérature féministe avant l’heure. Avant Simone de Beauvoir. Avant Virginie Despentes. Avant Annie Ernaux. Publié en 1925 et oui 100 ans déjà, c’est le roman d’une femme de caractère, d’une femme « appelée à faire briller sa petite lumière », autrement dit qui va au bout de sa passion, le piano. « Nous luttons pour sauver cette partie de nous-mêmes, qui est notre personnalité » écrit Louis Bromfield. Le philosophe Aristote affirmait pour sa part que la vie se mesure à ses accomplissements. Comme un poussin fraichement éclos, Ellen, l’héroïne va suivre une route solitaire. L’auteur laisse planer le doute. Quelle est sa part de chance, d’irrationnel, de hasard circonstanciel ? Plus vraisemblablement, Ellen est une de ces personnes à la hauteur du hasard !

Laurence Sterne. Beaucoup d’écrivains contemporains estiment devoir une fière chandelle à ce livre en termes d’inspirations. Il s’agit d’une biographie de Laurence Sterne avec la particularité qu’elle démarre à la conception de l’auteur et se termine quatre ans après sa naissance. Autant dire que l’auteur passe magistralement à côté du sujet. C’est en fait la chronique de la vie campagnarde anglaise qui donne lieu à toute sorte de digressions sur le monde intellectuel ou politique et la vie familiale des ascendants de l’auteur. Cette manière de procéder, passer littéralement à côté du sujet pour parler d’autre chose, a créé en littérature un véritable « « fan club » qu’on a appelé les « Shandiens ». Les « Shandiens » sont les auteurs qui prennent énormément de liberté avec leur sujet, qui ont une propension à l’exagération, à l’hyperbole et utilisent leur texte pour cibler l’esprit de sérieux comme un ouvrage de démolition. « J’ôte parfois mon bonnet de fou et le pose sur la table à côté de mon encrier pour donner à la scène qui va suivre un tantinet plus de solennité ! » écrit Laurence Sterne. 

Nous parlons d’Edouard Limonov et de son petit chef d’œuvre « Le poète russe préfère les grands nègres ». Edouard Limonov est d’abord une personnalité, une âme expansive, une âme russe. Limonov est aussi une sorte d’asocial proche du banditisme. Trafic d’arme et poésie. C’est un aventurier, un littéraire qui aime la chose militaire. Un auteur des bas-fonds aussi, ayant mené une vie de « clochard », « clochard céleste » si l’on veut positiver un peu l’expérience d’une vie de misère, de débauche et d’errance nocturne Limonov, comme tous ces auteurs dont la vocation d’écrivain a poussé comme de la mauvaise herbe, décrit le cauchemar de la réalité qui pèse sur tout poète. Dans son livre, il évoque ses déboires à New York où il mène la vie d’un personnage de Dostoïveski, égaré, éperdu, complètement à côté de la plaque. « Je ne cultive pas la logique mais la jouissance ! » écrit- il.